23 Janvier 2017
Voici ci-dessous ce qui est rarement publié et discuté : une démission. Pas n'importe laquelle celle d'un frère du GODF du Suprême Conseil et de ses ateliers supérieurs. L'intérêt de ce courrier est, du fait sa construction, de permettre une réflexion sur la démission que ce soit des "hauts grades" comme des loges bleues.
La démission – voir les démissions en franc-maçonnerie – est le sujet qui n'est jamais étudié. Elle est considérée non pas comme résultante d'une faillite du système mais comme celle du (ou de la) démissionnaire. Ce qui est une erreur d'analyse - qui montre bien l'incapacité des juridictions maçonniques de se remettre en cause, malgré tous les outils qu'offrent la franc-maçonnerie et l'initiation pour le faire.
Ce témoignage évoque largement le dogmatisme de ces ateliers supérieurs. J'analyserais, quant à moi, à ce que l'on appelle vulgairement à une « cordonite aigüe » de quelques uns Un inspecteur "choisi" par un dignitaire et des règles d'élection non respectées semblent être la principale cause de cette démission.
Ce témoignage parle de traumatisme – qui semble être celui d'un harcèlement moral ou similaire – d'anciens membres de ces hauts grades. C'est dire que ces situations conflictuelles peuvent être violentes et destructrices. Ce frère qui écrit témoigne aussi comment il s'est laissé abuser et comment il a "joué", durant un temps, avec les autres contre sa propre éthique et ses valeurs.
Il s'agit aussi d'une perte « culturelle » et donc d'une incapacité du groupe de transmission d'une culture, au sens de René Girard (in le Bouc-Emissaire). En effet, le second élément qui est reproché est le silence des frères membres de ces ateliers supérieurs, qui se « laissent faire », se laissent trahir, en laissent d'autres se faire bannir (excommuniés?) du groupe au nom de quelques intérêts équivoques ou encore se laissent diriger comme des "idiots utiles". Une perte de culture (de valeurs) du groupe en son entier comme de la poignée de ceux qui le dirigent.
La critique ne sert à rien si elle n'est pas suivie d'actions. C'est aussi l'essentiel du constat qui est fait par ce frère démissionnaire, reprochant à ses compagnons – d'avoir tout autant la critique facile – mais l'action molle sinon inexistante, faisant d'eux les moutons de service.
On découvre aussi, puisqu'il s'agit d'une juridiction de hauts grades du GODF au REAA, que la question de l'entrée des soeurs n'est toujours pas réglée. Le plafond de verre maçonnique a été inventé par le GODF. Je rappelle que la reconnaissance des degrés supérieurs des membres extérieurs au GODF (et surtout des soeurs), intégrant par ailleurs une loge bleue du GODF, n'est pas acceptée obligeant ainsi celui qui souhaite poursuivre son parcours à recommencer à partir du 4ème degré. Ce qui revient à dire qu'un maçon du 33ème degré - et cela peut être une maçonne du 33ème degré - devra passer si il (ou elle) souhaite intégrer le GODF tous ses degrés à partir du 4ème. Si le maçon a des chances de se voir au moins accepté, la soeur - quant à elle - en aura bien moins.
C'est la triste conséquence d'un double discours parfaitement assumé.
Mon expérience personnelle – c'est pour cette raison que je publie bien volontiers ce courrier – ressemble à ce témoignage, sauf que pour ce qui me concerne ma loge en a été à voter de me faire démissionner (ce qui signifie que la loge avait déjà sombré à l'époque) et, pour terminer, à voter de me radier dans les conditions que l'on sait et avec l'avis favorable de la conseillère fédérale en charge de la loge et la grande maîtresse de la GLFF.
Passe-droit – goût du pouvoir – peur de perdre aussi une « place » qui n'existe que dans l'imaginaire des esprits troublés des acteurs de toutes les affaires de ce type – règlements non-respectés - sont les éléments qui signent les dérives de n'importe quel groupe – et je dirais même de groupe qui de la franc-maçonnerie n'en porte que le nom mais aucunement les valeurs.
Les valeurs n'ont aucune utilité si elles ne servent pas de guide dans ses actions. Peu importe de les crier sur tous les toits si à l'intérieur de nos obédiences elles n'existent pas.
Je vous laisse à la lecture de ce témoignage – qu'il puisse servir à toutes et à tous à mettre en place les gardes-fous (et folles) nécessaires pour éviter que des juridictions entières s'effondrent sans avoir même les bases pour être reconstruites.
Ce courrier - parce que des milliers d'autres évoquent très certainement peu ou prou les mêmes faits - explique aussi pourquoi aucune obédience, aucune juridiction ne souhaitent voir la question des démissions étudier.
Je vous informe que j'ai décidé de démissionner à compter de ce jour, des Ateliers de Perfection, du Chapitre, du Conseil Philosophique et du Consistoire du 2e secteur.
Je tiens à vous préciser que cette démission n'a rien à voir avec vous, tant sur le plan personnel que sur votre présidence.
Je ne supporte plus la gouvernance totalitaire de certains (se cachant avec trop de facilité derrière la théorie du rouage) au sein de notre juridiction écossaise du 2e secteur et la bien triste soumission que cela induit. Une soumission qui a bien vite ses limites pour tout homme qui se donne le temps de réfléchir et de penser à la condition de le vouloir, et c'est là que le courage retrouvé nous met face à cette dérive totalitaire en provoquant la seule voie possible, celle de la rupture salvatrice.
Une brève analyse socio-politique où le concept de totalitarisme et de dictature sont exposés comme mode de la gouvernance pratiquée au sein de notre secteur. L'ordre est une structure comparable à celle de l'église catholique apostolique et romaine générant une gouvernance qui devient vite totalitaire, dictatoriale dans les mains de ceux qui n'ont pas le sens de la mesure, de la concorde et de la fraternité. L'Amour fraternel leur est inconnu tout autant que les apports du 18e grade : FOI, AMOUR, ESPERANCE ne sont que des mots qu'ils répètent, comme récitant le catéchisme par obligation du rituel, un peu comme à la messe, sans en comprendre véritablement le sens.
Leur devise est sans doute : "si tu la ramènes, sauve toi, sinon je t'écrase, car c'est moi la vérité faite homme car je suis, ici et maintenant, le seul et unique représentant de notre Ordre, et si tu résistes, malheur à toi, car tu resteras sur les seules colonnes que je te réserve à vie".
J'ai pu comptabiliser plus d'une trentaine de nos BAF qui ont eu à subir ce terrorisme intellectuel et dictatorial par cette rare violence des mots et attitudes. Ils ont soit démissionné purement et simplement, soit ils sont partis vers d'autres secteurs et pire, certains en sont encore traumatisés et choqués (peut-être faudrait il créer une fraternelle des Ex ?). Le mal est fait et il produit inlassablement cet effritement de la fraternité et de la "croyance" aux valeurs morales et philosophiques censées nous réunir dans les ateliers de perfection.
« Vous êtes normal, une personne ordinaire. Ni un criminel, ni un idéologue, ni un monstre pathologique. Un jour, toutes les normes auxquelles vous étiez habitué s'effondrent. Dès lors,vous courez le risque d'être complice des pires choses. Comment l'éviter ? Comment distinguer le bien du mal ? Comment dire non ? En essayant d'évaluer la situation. » Pour cela, explique Hannah ARENDT, cette très grande philosophe, « il faut penser, et penser par soi-même. Cet acte là, dit-elle aussi, n'est pas réservé à une élite. Émettre un jugement et prendre ses responsabilités, chacun quel qu'il soit, peut le faire. Encore faut-il en avoir la volonté...» in Hannah ARENDT, Responsabilité et jugement, 2010 éditions Payot.
Alors que penser de tous ceux qui résistent encore... Pour ma part, j'ai lutté, en choisissant comme arme pure la concorde par la raison mais sans succès, sauf une action remarquable qui porte le nom de la "révolution des acacias" dont le résultat fut appréciable et dont les effets furent l'installation au grand jour pour cette fois, "de la guillotine" par les mauvais compagnons (elle fonctionne toujours, mais dans l'ombre). La tradition au sein des ateliers de perfection fait que l'Inspecteur devienne le TFPM, mais voilà que le grand chef proposa son favori trois mois avant l'élection en demandant de faire exception à la tradition, car l'inspecteur n'en avait pas les qualités...(dans les grades blancs et ancien VM etc...) Nous avons lutté contre cet excès de pouvoir et l'atelier est resté, par 22 voix contre 20, libre et majeur, mais c'est la seule fois qu'il osa défier cette dictature.
Ma démission sera portée à la connaissance des BAF, car ainsi, ils se reconnaîtront et ils ne pourront plus dire " je ne savais pas". Pourquoi informer les BAF, c'est simple, ma lettre ne sera pas lue en atelier, (vert, rouge, noir et blanc) sanctionnée, censurée comme il est habituel à chaque démission, ou presque...Une démission, c'est une démission...et puis comme à la grande Guerre, « cette boucherie organisée par certains généraux se survit à elle-même..car il y a la réserve, l'armée de l'ombre, celle qui remplace spontanément le mort au front par un survivant, encore debout pour quelques secondes dans les fils barbelés...
Ainsi se pérennise l'institution à R*.
Mon départ attendu, par ces tortionnaires de la pensée Mon départ attendu, par ces tortionnaires de la pensée et du comportement, sera salué, par eux comme il se doit, et la concorde (c'est à dire la totale soumission) pourra se poursuivre.
Car dénoncer cette situation est pour eux rompre la concorde, dont la seule force est de faire taire la vérité des faits qui pourraient leur être reprochés.
Je ne veux plus être le témoin impuissant face à cette banalité du mal - au sens d'Annah Arendt - depuis trop longtemps imposée à "des auditeurs" aveugles et sourds pour certains en séances... mais retrouvant l'esprit critique et la raison à la sortie du temple sacré !
J'ai été cet idiot utile, nécessaire à cette mécanique reproductive de cette lamentable situation, espérant encore un changement, car je percevais ces bruits sourds annonciateurs de prise de conscience et d'une révolte prochaine contre cette dictature, mais je rêvais...
Je ne supporte plus ces faux amis de nos valeurs maçonniques (c'est une question d'éthique et de dignité) et je me refuse à en demeurer l'idiot utile, et ce sont là les motifs réels objectivant mon départ des ateliers de perfection et de ceux qui les suivent.
Je vais pouvoir maintenant me livrer, in ultima fine, ne faut-il pas aller au-delà de l'arbre qui cache la foret en parodiant et en citant Claude Guérillot : « D'une certaine façon, la vie de cet arbre se confond avec l'histoire du Suprême Conseil. Il n'est nullement question d'écrire ici je ne sais quelles grandeurs et servitudes maçonniques. Des grandeurs, il y en eut, les unes connues et d'autres oubliées, des servitudes aussi, comme des erreurs et des fautes...Il serait trop facile d'instruire leur procès, de dénoncer l'arrogance de certains, l'ignorance d'autres, l'illégalité de certaines décisions... les plaçant au-dessus de tous. » in Les Degrés Ultimes du REAA, Éditions Véga 2005.
Bien évidemment, je ne partage pas totalement cette facilité affichée, car à ne pas vouloir instruire un procès, c'est se soumettre en laissant faire, -pour certains, sans doute, en attente de la reconnaissance de leur soumission récompensée par une augmentation de salaire, le grand principe de la méritocratie en action, seul pouvoir du grand chef (lire La Boétie), c'est courir le risque de voir se transformer la banalité du mal en mal radical. J'ai trop longtemps participé à leur élection en croyant à l'espoir d'un changement comportemental. Hélas, le mal est trop profond et il relève sans doute de la pathologie du pouvoir dictatorial...et de la faiblesse de ceux qui voient...mais qui ne font rien.
Ainsi, mais ils ne le savent pas, ils font partie aussi de ce grave problème. Ils sont les complices de cette tyrannie, par immobilisme constant, mais demain, ils seront leurs victimes.
La démocratie n'a pas droit de cité dans un Ordre pyramidal tel que celui du REAA pour ce que j'en connais par expérience personnelle, dans le 2e secteur. Tous les ateliers sont aux ordres impératifs et dictatoriaux du même BAF et de sa garde rapprochée. Et maintenant qu'il est membre actif du suprême conseil...il décide seul des promotions à la tête du "client" (je ne sais plus combien de fois il a rappelé qu'il était membre de la commission des promotions).
De plus, il impose sa méthode de travail comme étant la seule possible, une forme de catéchisme qu'il faut réciter par écrit, toute sortie "du rituel canonique", même légère, étant sanctionnée avec violence. Je m'y suis toujours opposé, car l'oralité est la force de la pensée raisonnée et raisonnante, c'est la parole en évolution, et non le copié collé trop souvent utilisé.
Pour ce qui est de la mixité, ses prises de position sont contradictoires mais en tout état de cause, il interdit d'en décider à nouveau dans les ateliers, seule la visite des SS sera proposée aux ateliers.
Bref, je pourrais continuer...et bien non, j'arrête et je confirme ici ma démission, ce jour 21décembre 2016 de tous les ateliers du REAA auxquels j'appartiens car vous êtes en connaissance de tous ces dysfonctionnements, et je vous laisse en prise avec votre conscience.
Sachez quand même que tout système totalitaire est destructeur de l'humain et : « Du seul fait qu'ils sont capables de penser, les êtres humains sont suspects par définition » in le totalitarisme au pouvoir, Annah Arendt.
Sachez aussi, par souci de transparence et d’honnêteté, qu'avant la publication de cette lettre, j'avais sollicité auprès de ce Triste Frère un rendez-vous, par message laissé sur son portable, puis sans réponse de sa part, confirmé par email (dont j'ai reçu accusé de réception de lecture), mais en vain... Passé le délai raisonnable que je lui proposais, je lui indiquais qu'ainsi il me laisserait libre de publier les raisons de ma démission, ce que je fais aujourd'hui.
En ce jour de solstice d'hiver, qui n'est sans doute pas un hasard, j'espère pour l'avenir de la Juridiction Ecossaise, que la lumière croissante jour après jour, finira par éclairer les consciences pour que règne enfin la vraie Fraternité.
Recevez, mes Bien Aimés Frères, mes salutations fraternelles.
M