8 Mai 2014
La plupart du temps, ces remarques vous sont envoyées comme point final à une conversation, comme un jugement sans appel et – disons-le – arbitrairement. C'est d'ailleurs cela leur côté franchement agaçant. Ceux et celles qui les utilisent, certains plus souvent que d'autres, font bien sûr référence aux valeurs et/ou qualités que toutes bonnes maçonnes et tous bons maçons sont censés non seulement connaître, mais aussi pratiquer avec dévotion. En effet, sémantiquement parlant, « ce n'est pas maçonnique » est la même chose qu'un « ce n'est pas chrétien ». En gros, les références sont les mêmes : tendre l'autre joue, aimer son prochain … entrer dans le moule.
Tout comme le prêtre qui harangue la foule de fidèles à l'église le dimanche matin, ces frères et ces sœurs estiment détenir la juste définition de ces valeurs et/ou qualités, s'autoproclamant au passage super-guide spirituel, et qu'ils en font eux-mêmes un usage implacable.
Tenter d'en discuter avec eux, c'est un peu parler avec une porte blindée ou un grand inquisiteur.
Je distingue, de même, le « ce n'est pas maçonnique » - cri du cœur face à une injustice, un propos déplacé (raciste, sexisme, homophobe …) au jugement sentencieux qui est généralement assorti d'une leçon sur le fil à plomb à découvrir, le secret, l'engagement, la tolérance …
Si cela m'énerve (mais m'énerve vraiment), c'est bien sûr lié à mon histoire, mais aussi parce qu'il s'agit – non pas uniquement d'un jugement – mais d'une manipulation : vous êtes sorti du cadre, cela dérange pour une raison ou une autre, on vous culpabilise. Le pire est que cela marche. Le jeune apprenti, compagnon ou maître se sent coupable de s'être égarer sur les chemins de luxures profanes.
Si vous avez été malhonnête, avez trompé, trahi, pas été très courageux, si vous avez menti, critiqué une personne, si vous l'avez insulté, si vous avez fait un oubli, si vous avez été impoli, grossier, fait une promesse que vous n'avez pas tenu, si vous avez traité quelqu'un avec mépris et arrogance, on vous le dira sans passer par un « ce n'est pas maçonnique » et une leçon de chose sur la pierre brute. A vous donc d'assumer.
Si vous cherchez en vain ce que vous avez fait de mal et ne trouvez rien, vous êtes effectivement devant une manipulation.
Les francs-maçons aiment se dire libres, mais beaucoup d'entre eux ne supportent pas l'indépendance des autres. Il y a des frères et des sœurs qui découvrent le « pouvoir », d'autres qui pensent appartenir à une élite, d'autres qui ont juste un système de valeur un peu fermée et qui font de la franc-maçonnerie une religion. Tout comme, vous pouvez rencontrer une personne toxique.
Quoique vous soyez, c'est comme pour les cadeaux: c'est l'intention qui compte.
Nous avons envie, parfois, de lancer un « ce n'est pas maçonnique » à la figure de quelqu'un. C'est facile. Comme on nous le dit, après tout, pourquoi chercher plus loin.
Cela peut concerner une opinion, une idée un peu trop farfelue à votre goût, vous avez devant vous un frère ou une sœur qui n'est pas un bigot du secret ou de l'engagement maçonnique, qui ne sait toujours pas pour quel plateau est le fil à plomb … Avant de sortir l'artillerie lourde, demandez- vous :en quoi cela vous empêche-t-il de suivre votre propre chemin ?
Lilithement vôtre,