22 Juillet 2014
La franc-maçonnerie propose une démarche initiatique ou spirituelle. Si la méthode – méthode de pensée – se transmet, la démarche elle-même ne se transmet pas étant spécifique à chaque sœur et frère. Si elle se transmettait, elle serait religion et dogme. De même, la démarche elle-même est une longue construction de soi, effectuée à l'aide, bien sûr, de son travail en loge, de son vécu, de ses rencontres, de ses points d'intérêt, … Ainsi, une sœur et un frère qui l'a compris – ne peut que parler de sa propre démarche s'ils ont les mots pour le faire. La difficulté, en effet, est essentiellement celle du discours.
La question de nos croyances apparaît de plus en plus souvent dans une maçonnerie libérale et adogmatique, éclairant finalement une incompréhension générale et l'usage de mauvais termes appliqués aux autres. Vous trouverez dans ce blog deux articles définissant le théisme, l'athéisme et le déisme.
Évidement, l'interdit de l'athéisme en maçonnerie existe toujours : les fameuses constitutions d'Anderson. C'est certainement le seul interdit qui est le mieux pratiqué en maçonnerie régulière.
Je suis surprise, quant à moi, surprise de lire des propos de maçons sur l'athéisme d'un autre temps.
Cela tombe bien. Je le suis.
Celui qui a inventé cela est un pur idiot ou un incroyable hypocrite. Les frères et sœurs qui partent de cette idée estiment que nous nous sommes tous construit avec une part de croyance acquise dans une société imprégnée de religiosité.
C'est vrai que nous nous construisons au gré de nos rencontres et notre éducation joue un rôle. Or, personne ne dit que nous sommes tous condamné à suivre le chemin qui fut tracé pour nous par nos parents. L'athéisme n'est pas non plus quelque chose que l'on choisit, un beau jour sur la terrasse d'un café, pas plus que de croire en dieu. L'athéisme est de ne pas croire en dieu – et plus largement – en une force supérieure, créatrice de l'univers, qu'elle soit vivante, morte ou occupée ailleurs.
Si l'athée peut croire, il croit en l'humanité – qui, elle,existe bel et bien – en l'être humain, en sa capacité de faire le bon, d'évoluer, de se transformer … Bref, on peut tortiller la question dans tous les sens : l'humanité n'est pas un dieu révélé, ni un dieu des déistes, ni une force supérieure … (et à quoi?). L'humanité n'a rien de surnaturel et n'appelle pas à la transcendance.
Sur le plan de la démarche elle-même, considérer que l'athéisme n'existe pas, c'est quand même avoir loupé quelque chose quant à la définition même de l'être humain – qui finalement n'existerait que suivant ses croyances et qu'à travers l'existence supposée de dieu.
C'est idiot – parce que ces mêmes personnes croient elle-même en quelque chose qu'elles n'ont jamais rencontré et préfèrent ne pas croire en l'existence de l'athéisme. En un mot, elles ont plus de chance d'avoir un athée comme voisin que dieu lui-même.
D'après des dernières statistiques, il y a environ 50% en France de personne qui disent « ne croire en rien de particulier » et 30% qui se considèrent « athées ».
Cette tendance à nier l'existence des athées touchent surtout, non pas les théistes, mais les déistes – déistes qui se bidouillent eux-même une croyance, remettant en cause le cadre acquis dans leur enfance. Est-ce que l'athéisme est ce qu'ils peuvent pas rencontrer pour eux-mêmes devenant une limite inatteignable ?
Pour nos obédiences, le fait de considérer que l'athéisme n'existe pas est une manière de dire que tous les maçons sont croyants (en quelque chose). Il n'y a finalement qu'un type de maçonnerie qui y voit un intérêt structurel : ne pouvant pas interdire les athées, elle les nie. Il s'agit, bien sûr, de cette maçonnerie traditionnelle qui se veut spiritualiste.
Les athées existent.
Autrement dit, l'athée est un handicapé mental. Il ne peut pas comprendre toutes les nuances d'un rituel, ne peut construire une démarche ésotérique et serait même un boulet pour les autres.
C'est – excusez-moi l'expression – carrément une ségrégation allant à l'encontre de tous les principes contemporains des droits universels de l'être humain. En même temps, ceux-là pensent que les femmes, du fait de leur sensibilité biologique, ne peuvent percevoir la rudesse du travail du maçon.
En étant, femme et athée, je ne vous dit même pas ce que j'en pense !
Croire n'invite pas spécialement à une meilleur compréhension de l'univers et à en déceler tous ses mystères. Je dirais même que croire pourrait boucher de nombreux horizons. Qu'y-a-t-il de pire qu'un maçon qui a des réponses ?
Là, nous revenons grosso modo dans les pires heures du passé, quand les athées, êtres sans âme, étaient des criminels. Ils ne pouvaient pas connaître et apprécier les lois morales divines. Celles qui ont conduit - et conduisent encore – des hommes à commettre tant de crimes qu'il serait difficile d'en faire ici une liste exhaustive ou pire encore moralité a servi de prétexte pour en commettre.
A notre époque, il est difficile de proposer un tel argument, même si certains y sont encore tentés.
Une question morale de fond se pose: faut-il être croyant pour ne pas tuer son prochain ?
L'athée est cependant accusé de divers maux : matérialiste, égoïsme, individualisme, et il serait foncièrement anti-religieux, le crime suprême.
Froid, sans cœur, sans esprit, égoïste, l'athée est infréquentable. Plusieurs études américaines, le pays le plus religieux du monde occidental, démontre une véritable méfiance vis-à-vis des athées. Les américains seraient que 45% à vouloir voter pour un athée. (source)
Il faudrait étudier tous les pays – généralement les plus religieux – pour comprendre leur relation ambiguë avec l'athéisme.
Pour la franc-maçonnerie, c'est à la fois un élément d'histoire mais aussi un défaut de définition. En effet, pour beaucoup, la spiritualité ne peut pas être sans croyance – dans le meilleur des cas – sans religion, dans le pire des cas. Ce qui est, pour le coup, restrictif. Elle ne peut exister sans dieu ou notion de divin. La spiritualité se construirait à partir de et autour de cette notion.
Or, l'être humain n'est pas qu'un être devant croire – il est – C'est un constat d'existence. La spiritualité est juste ce constat que nous existons – êtres vivants et pensants – complexes – créatifs et primitifs – animaux et civilisés – contradictoires.
La franc-maçonnerie permet, par ses outils, à cette découverte à soi. A faire ce constat et à en mesurer que l'infini est nous.
De mon expérience personnelle, je considère qu'au contraire la franc-maçonnerie, de part justement sa méthode, est adaptée à tout le monde et surtout aux athées.
C'est une question d'envie et non pas de croyance. Le plus croyant, et convaincu qui soit, ne sera pas plus à l'aise en maçonnerie s'il considère que les réponses que lui donnent sa religion lui suffit.
Un déiste ne sera pas plus heureux s'il pense que son bricolage et les philosophes lui apportent le réconfort nécessaire. Un athée, quant à lui, s'il n'a pas envie, s'il ne ressent pas le besoin d'un autre chose, pourra se contenter de ce que la vie lui donne. C'est plus souvent une question de personnalité qu'une question de croyance.
S'il n'y a pas envie, ni les uns, ni les autres ne seront capables de se construire quoique ce soit, c'est-à-dire prendre d'autres chemins, voir même se trouver la raison d'une quête. En étant athée, je n'avais rien à remettre en cause, rien à bousculer, hormis mes propres préjugés sur moi-même. Je ne comptais rien y trouver de plus et ne fondait pas l'espoir d'avoir plus de réponses qu'avant. Je n'ai jamais été même « en révolte » contre la franc-maçonnerie en elle-même et ce qu'il y était possible de faire ou non. Par contre, oui – je me suis révoltée contre les idées toutes faites, lorsque l'on tente de m'imposer un choix ou une définition dans ma démarche, de me coller une étiquette sur le dos puisque athée, de penser pour moi, ....
La difficulté est venue plus tard : tout est à découvrir, toutes les questions sont à poser, tout restera question. Le plus difficile a été de l'accepter et d'accepter que l'on ne fait qu'essayer.
Un opératif sait une chose : ce n'est pas apprendre à utiliser les outils qui est l'Art, mais c'est de les réparer et de les inventer. Il sait aussi que c'est en apprenant à les utiliser qu'il saura plus tard en inventer d'autres. C'est cela l'amélioration et le progrès.
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Cette illustration est de Yaka - un petit cadeau fait à l'intention de cet article après sa publication ...
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Ci-dessous, un article du blog "Si Fodieris Invenies" pour continuer la réflexion ...
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