16 Mars 2016
Nos démarches nous appartiennent et nous regardent. Elles sont individuelles - voir même uniques – pour chacune originale.
Dans les débats contemporains sur la franc-maçonnerie, on résume la démarche à la croyance ou à la non-croyance à un principe divin. Les obédiences adogmatiques ont adopté la devise « Liberté. Egalité. Fraternité ».
C’est la « Déclaration de l’Homme et du citoyen » de 1789 qui forge les deux premiers mots : liberté et égalité. « Fraternité » apparait sur les drapeaux de la fête de la fédération du 14 juillet 1790. Ce sont les citoyens Camille Desmoulins et Robespierre qui, les premiers, utilisèrent la formule associant les trois mots. Disparaissant par la suite, la devise réapparait lors de la révolution de 1830. Elle devient réellement un principe de la République lors de la Révolution de 1848. Le GODF l’adoptera qu’en 1849 et l’inscrit dans ses rituels en 1887. Elle servira encore sous la IIIème République, inscrite dès 1880 sur tous les frontons des édifices publics, comme pour les républiques suivantes. Elle fut momentanément effacée sous le régime de Vichy, durant la 2ème guerre mondiale, pour être remplacée par « Travail. Famille. Patrie ». L’origine de ces trois mots n’est pas maçonnique. Elle serait bien plus d’ordre social et politique.
Ces trois mots propagés en toute occasion sont, néanmoins, essentiels. Ils s’inscrivent dans une démarche maçonnique authentique. Je considère que nous ne sommes, ni libres, ni égaux, ni même fraternels, mais que nous y travaillons. La liberté, l’égalité et la fraternité ne sont pas acquis, ni même donnés. Ces trois mots résument des idéaux, autant sociaux et politiques comme nous l’avons vu, mais aussi initiatiques. Cela change quelque peu la perspective. Certains frères et sœurs estiment qu’ils sont libres, égaux et même fraternels – sous le prétexte qu’ils sont « initiés » – bref, ce sont des parangons de vertus – On les reconnaît facilement : ce sont nos « donneurs de leçon » -
D’une sensibilité à l’autre, ces trois mots ont des sens différents d’où des planches qui nécessiteraient la construction d’une nouvelle BnF si nous avions dans l’idée de les rassembler. Je ne compte pas vous passer en revue les trois mots. Un seul suffit : la liberté. Elle conduit, selon moi, au deux autres assez naturellement : être libre est de savoir que l’autre est notre égal, l’altérité s’efface. L’autre est notre frère (ou sœur). La liberté dans le cadre d’une démarche initiatique est notre capacité à appréhender les choses, observer le monde qui nous entoure, à penser autrement. Elle consiste à chercher un sens unique et personnel à toute chose comme à notre existence. La liberté est une quête, la quête la plus importante de toute l’histoire de l’humanité. Cette quête oblige d’accepter la liberté de l’autre. Il se peut même que l’on voit en l’autre un être bien plus libre que soi et d’y trouver une source d’inspiration. Vous comprenez mieux que sans cette quête émancipatrice, l’égalité et la fraternité ne peut trouver une place. L’homme ou la femme, dans cette quête, sait décrire le long processus émancipateur de sa pensée, comme il sait dire que cette quête n’est jamais terminée. Il ne s’écrie pas « je suis libre » mais au contraire « je veux être libre » en ajoutant « je travaille dure pour l’être encore plus ».
La liberté est, en effet, un exercice difficile. Je pourrais dire, pour beaucoup, contraignant : cette quête demande de quitter son petit confort, de courir des risques, de quitter toute pensée « toute faite » et la sécurité d’être dans « la masse ». Les plus grands défenseurs des droits et des libertés ont été minoritaires. Eux aussi ne croyaient pas être libres. Eux aussi espéraient trouver dans leur société le composte nécessaire pour laisser pousser des libertés nouvelles. La franc-maçonnerie possède un moyen (nous parlons même d’outils) pour mener cette quête : l’étude symbolique. Elle est, malheureusement, réduite par de nombreux francs-maçons et franc-maçonnes au mieux à un exercice de style obligatoire au pire à un machin poussiéreux et peu passionnant. Je ne connais, pour ma part, pas de meilleur moyen pour débuter une quête – celle que vous voulez – et devenir libre un peu plus chaque jour.