3 Décembre 2018
Suite au discours de Emmanuel Macron ce mardi 27 novembre, les « Gilets Jaunes » ont décidé d'entrer dans l'acte III qui est apparu être la manifestation la plus violente depuis 1968. L'acte IV se prépare. Il est à craindre que ce ne sont pas des promesses creuses qui suffiront à l'éviter.
La balle est dans le camp de Macron et du gouvernement.
Macron porte, d'ors et déjà, la responsabilité de la plus grande crise sociale du pays de la Vème République. Politiquement, il est fichu. Son pseudo-parti « En Marche » qui ne reposait que sur sa personnalité, aussi. Les relais parlementaires ne fonctionnent pas. Les députés de la majorité n'ont, en effet, aucune crédibilité tant, du fait, de leur absence sur le terrain que lors des débats politiques. Au niveau international, l'image de Macron est tout autant ruinée.
La question de la taxe n'est pas le seul problème soulevé par cette manifestation. On pourrait même dire qu'elle est devenue, au fil des jours, secondaire. La colère des français est causé autant par un pouvoir d'achat diminué, une politique de fiscalité qui ne bénéficie qu'aux plus riches avec l'abandon de l'ISF, mais aussi concerne la gestion même du territoire. C'est autant la fermeture de maternités, d'hôpitaux, de services d'urgence, d'écoles, le dépeuplement de centres villes vidés depuis plusieurs décennies au profit de centres commerciaux, … qu'une politique fiscale de plus en plus incompréhensible et guère plus logique dont il s'agit.
Ce qui est reproché est que les politiques, depuis plusieurs décennies, ne pensent plus la France comme une communauté de citoyens égaux, comme un territoire à aménager avec toutes les contraintes effectivement autant économiques qu'écologiques, mais aussi humaines. … La France n'intéresse plus les politiques français depuis plusieurs décennies.
L'autre élément est la gestion de la crise par Macron et le gouvernement. On ne peut pas espérer convaincre des français que l'on a pris pour des idiots, hauts et forts, durant une année. Il ne faut pas un diplôme de psychologie pour le comprendre. Macron paye, certes, 20 ans d'incompétence politique, mais il paye aussi pour sa propre arrogance et sa morgue.
Face aux « Gilets Jaunes », le parti-pris des médias n'a pas aidé. Tout a été fait pour déprécié ces manifestations. Y compris l'importance du mouvement. Selon les syndicats policiers, le 17 novembre, il y aurait eu au moins 500 000 manifestants sur toute la France, au lieu des 280 000 (source) Le 24 novembre, ils en décomptent 750 000 dont 200 000 à Paris. Castaner a réussi à décompter 106 301 manifestants sur tout le territoire. Une telle précision montre toute la mesure de la fake news gouvernementale. (source)
A Paris, il n'y avait « que » 8000 manifestants. Des journalistes ont même osé prétendre que les féministes (lors de la Journée contre les violences faites aux femmes) étaient plus nombreuses que les « Gilets Jaunes » sans remettre en cause un seul instant l'énoncé d'une telle bêtise.
Le photojournaliste Oliver Coret, dont certaines photographies illustrent cet article, montre une manifestation ayant une toute autre ampleur - ici -
Ils seraient même, ce 1er décembre, moins nombreux que le 24 novembre, avec que 5500 manifestants à Paris. Face à eux : 5000 CRS mobilisés à Paris …. Il faut oser !
Voici pour les sources : Plus de 4000 policiers ont été déployés pour France Bleu, on peut lire pour le JDD ce 3 décembre, qu'il s'agirait de 4600 membres de la police mobile avec 14000 grenades d'envoyés sur 3000 "casseurs", mais il en était compté que 1500 "casseurs" sur France TV ici et enfin pour France Inter, il y aurait eu 5500 manifestants à Paris (lire ici) pour un total de 75000 manifestants sur toute la France. Toutefois, là aussi encore un problème, on garde nos 5500 manifestants à Paris mais on en a trouvé que 36 000 pour toute la France (ici). Le plaisir des informations pas très claires.
Soit la France est dotée du plus mauvais système policier au monde, soit le gouvernement est devenu le spécialiste de la fake news et pas le meilleur. Je peux promettre aux grands médias un avenir sombre pour avoir participer à la désinformation des français.
La colère des policiers est, pour le coup, parfaitement compréhensible et audible. En effet, comment croire qu'ils puissent être débordé en étant un contre un ? Ils ne sont pas face à une poignée de manifestants dont le nombre leur serait presque égal – et pour les « casseurs » même inférieurs – mais à une foule innombrable et imprévisible.
Côté des "Gilest Jaunes", quoi de pire pour des gens qui veulent rendre visible et audible leurs revendications constater que les médias expliquent « qu'ils n'existent pas » ? Macron et son gouvernement ont fait, là, une erreur magistrale : refuser l'essentiel, c'est-à-dire la reconnaissance d'une réelle contestation dans toutes les couches de la société, cela a conduit à la radicalisation du mouvement, tout au moins d'une partie des manifestants.
Le bon sens général fait dire que Macron et son gouvernement n'ont pas d'autres choix que de céder, au moins, sur les taxes sur le carburant. La contestation populaire aura donc gagnée cette première partie. Malheureusement, ce ne sera qu'une première partie. Avant d'ouvrir des paris, il faudra aussi compter sur l'incompétence et l'irresponsabilité de Macron.
Le Sénat a rejeté massivement le projet de loi de Finance 2019. En effet, en dehors de conduire à des manifestations depuis trois semaines, les recettes liées à l'augmentation de la taxe sur le carburant sont allouées exclusivement au fonctionnement de l'Etat et ne seront pas reversées à la transition énergétique. Le compte dédié à la mise en place de projets écologiques reste identique à celui de 2018, c'est-à-dire qu'il n'augmente pas entre 2018 et 2019. Macron et son gouvernement, au même titre que les députés qui ont voté ce budget, mentent aux français depuis plusieurs semaines. (lire ici l'article de Public Sénat sur le rejet du projet de loi des finances pour 2019 et ici les détails concernant cette loi).
Entre mensonge et irresponsabilité, Macron a conduit le pays dans une crise sociale majeure. Crise sociale qui aujourd'hui touche les plus jeunes avec les premières manifestations des lycéens et des étudiants.

Vous pouvez trouver le portfolio complet de Olivier Coret en cliquant ici et tous les photographes de Divergence sur le site ici.