8 Mai 2019
De marronniers en marronniers, de conférences en interviews, cela fait des années – des décennies – que nos dignitaires expliquent que les obédiences (pas la franc-maçonnerie) sont les « gardiennes de la République », portent haut et fort des idées novatrices, conseillent les politiques, …. et participent aux lois.
Il est inutile d'être un vil complotiste pour le croire sur parole. Il ne faut pas aller très loin, Jean-Philippe Hubsch, grand maitre du GODF, déclarait encore en août 2018 :
« Même si le GODF communique moins qu’avant sur ce qu’il fait, il agit pourtant beaucoup. Nous participons par exemple aux débats sur la bioéthique, la fin de vie (l’euthanasie) ou le développement durable, au sujet desquels nous sommes régulièrement auditionnés par le Parlement. Nous devons demeurer une vigie de la Société et nos travaux, insuffisamment connus, doivent sortir des Temples. »
et de continuer « Ce matin, j’ai rencontré la ministre des Outre-Mer, Annick Girardin, pendant deux heures, avec mon prédécesseur, Philippe Foussier. Nous avons notamment évoqué la situation à Mayotte et en Guyane. Cet échange est essentiel, car il va nous permettre de proposer des thèmes de réflexion à nos loges, dont les travaux pourront nourrir de nouveaux échanges avec des décideurs. » Sur le blog La Lumière - François Koch
Clairement, Jean-Philippe Hubsch donne raison aux complotistes: le GODF est main dans la main avec le gouvernement. Voir même qu'il en est très heureux … et je ne ferais aucun commentaire sur ce que je pense sur la qualité de « vigie de la société ». Même sous la torture. Aïe !
Si le GODF sait communiquer au sujet de « Notre Dame de Paris », pour les victimes de la moindre inondation, … il a été incapable de déplorer – ne serait-ce qu'une fois – les nombreux blessés graves que l'on dénombre depuis 6 mois suite aux violences policières. C'est d'ailleurs la même chose pour les autres obédiences adogmatiques – sauf le Droit Humain qui a communiqué au sujet des revendications –
Autant résumer l'impression générale : les obédiences maçonniques semblent soutenir le gouvernement actuel quelque soit les dégâts humains collatéraux pour endiguer une contestation sociale qui dure depuis 6 mois.
Pas plus tard que cette semaine, un frère écrivait sur mon mur FB combien il fallait fracasser les Gilets Jaunes avec des masses d'armes, appelant à des massacres. Cela rejoint les échanges sur le blog "Hiram.Be" - particulièrement inacceptables pour ses grands défenseurs des droits universels.
Ce silence et ces réactions haineuses de quelques frères ou soeurs sont dommageables pour les obédiences maçonniques d'une part qui seront, dans l'histoire de cette contestation sociale, les grandes absentes mais aussi pour les frères et les sœurs qui, d'une manière ou d'une autre, se sont engagés au cœur de cette contestation.
Les relations des frères et sœurs – au moins de quelques uns et unes– avec les citoyens, en pleine crise « Gilets Jaunes », a sensiblement évolué. Les Gilets Jaunes ont été aussi, pour beaucoup de citoyens, l'occasion de rencontre, d'échanger avec d'autres, dans une société qui se définit par l'individualisme et l'hyper-consommation.
Beaucoup se trouvent à expliquer ce qu'est la franc-maçonnerie à des personnes qui, jusque là, ne s'y intéressaient pas à part reprendre, pour leur compte, les propos lus, ici ou là. Bref, à des personnes qui ne souhaitent pas devenir « franc-maçon » aujourd'hui ou dans 10 ans.
Cela fait plusieurs fois que je suis interpellée par cette question : que dire aux profanes ?
Je n'ai pas de recettes secrètes. Si je l'avais, je ne la publierais pas gratuitement. Voici, néanmoins, quelques conseils de base.
1 – Ne jugez pas l'autre.
C'est, il me semble, la base de la méthode maçonnique. Celle ou celui qui explique que les francs-maçons ont participé durant des années au laxisme politique dont on paye les pots cassés aujourd'hui, a tout simplement, un jour, lu l'interview d'un grand maître du GODF, acheté « Le Point » ou « l'Express ». C'est tout.
Je trouve même désastreux le mépris de certains frères ou sœurs à l'égard des non-initiés. Hurler au complotisme ne sert à rien ! Il ne fait d'ailleurs que renforcer l'idée que les francs-maçons sont, en plus, d'être à la botte des politiques, que des obscurs pédants, complètement hors sol.
2 – Demandez un développement.
Le mieux est de poser quelques questions. Cela s'appelle l'écoute active. Afin de combattre cette, ô combien, fâcheuse rumeur, il faut en connaître l'origine. Bon ceci dit, cela permet de vérifier le degré de sincérité de votre interlocuteur ou interlocutrice.
Inutile de perdre son temps avec quelqu'un qui croit que vous mangez des chats, alors que vous êtes vegan, ou encore que vous adorez satan, alors que vous êtes athée. Je dis cela, mais après tout, vous faites ce que vous voulez.
Laissez parler l'autre permet aussi de comprendre ce qui dérange dans le fait maçonnique. Ne croyez surtout pas que vous avez tout compris, vous allez vous prendre un mur et entrez dans le cercle vicieux de l'incommunicabilité. Pour en avoir fait l'expérience, vous risquez même d'avoir quelques surprises ....
3- On a le droit de ne pas aimer la franc-maçonnerie.
Oui. Oui. Il y a plein de chose que vous n'aimez pas : la religion, la psychanalyse, les syndicats, le tofu, … et on ne vous fait pas un procès pour autant. Gardez à l'esprit que les personnes en face, même si elles peuvent évoluer dans leur opinion, ne sont pas obligées aimer la franc-maçonnerie. En somme, ne faites pas du prosélytisme.
4- Soyez honnête.
Là, vous allez êtes confronté à la difficile confrontation entre la réalité et le mythe. Je veux bien que l'on explique que les obédiences maçonniques participent aux débats politiques. Mais lesquels ? Concrètement, sur quel sujet – vous – avez-vous travaillé et que vous savez qu'il a participé à donner une orientation globale pour votre obédience ? A quelle commission avez-vous participé ? Quelles sont les sujets de vos dernières planches ? Quelles sont les planches qui vous ont le plus marqués ces dernières années ? Quelles est le livre maçonnique, le texte maçonnique, qui vous a permis d'avancer ?
C'est cela la réalité. Le reste, c'est le mythe. La question n'est pas, vraiment, ce que font les autres en franc-maçonnerie, ce que les obédiences sont censées faire, mais ce que vous faites - vous -
5 – Soyez humble.
Si je trouve désastreux les frères et les sœurs qui méprisent les profanes, s'estimant victimes d'un anti-maçonnisme et criant au complot assez sottement, je trouve tout aussi incroyable que ceux et celles qui pensent que la franc-maçonnerie est tout, à réponse à tout, sait tout, fait tout … et a tout inventé.
Il existe des associations qui sont de pleins pieds dans le quotidien des français. SOS Racisme a bien plus lutter contre le racisme que les obédiences, malgré leurs engagements pour la tolérance. Les associations féministes combattent bien mieux pour l'égalité femme/homme que les obédiences mixtes ou féminines.
6 – Demandez à vos dignitaires de se montrer clair et honnête lors des interviews.
Comme je l'expliquais au début de cet article, la désastreuse image des obédiences n'a pas uniquement pour origine les écrits anti-maçonniques, mais aussi les propos des dignitaires des obédiences, qu'ils soient grands maîtres ou conseillers fédéraux et/ou de l'ordre, que ce soit dans les journaux, les marronniers, lors de conférences. Sur cela, vous pouvez agir – du moins tenter de le faire -