18 Mars 2023
Quoique l'on puisse penser de la réforme de retraite – qui au demeurant n'est qu'un projet de loi de financement rectificative de la sécurité sociale pour 2023 et n'appartient donc pas à un projet plus global de réforme en tant que telle – il est inconcevable que le Emmanuel Macron, Président de la République, et sa Première Ministre Elisabeth Borne aient refusé un vote du Parlement (en seconde lecture), préférant d'appliquer l'article 49.3. C'est à dire forcer la loi.
Cela après avoir appliquer plusieurs mesures coercitives afin de limiter les débats : comme l'article 47 ou le vote bloqué pour un Sénat pourtant majoritairement acquis à ce projet de loi.
C'est d'ailleurs assez, selon certains constitutionnalistes, pour espérer voir la réforme retoquée entièrement pour défaut de "clarté et de sincérité" des débats parlementaires et détournement de procédures par le Conseil Constitutionnel. Or, vu son fonctionnement parfaitement aléatoire – pour ne pas dire autrement – il s'agirait là plus d'un pari que d'une certitude, même si le recours est possible. (Source ici)
? Signalement n°5662
— Violences Policières (@violencespolice) March 17, 2023
Un manifestant blessé au visage par un tir de LBD-40, hier soir à Rennes. Fracture dentaire et plaie traversante à la lèvre supérieure. Il a annoncé porter plainte.#Rennes 16/03/23 21h, Source victime #ReformeDesRetraites #Revolution #ViolencesPolicieres pic.twitter.com/FnaLxjpK9V
Deux motions de censure sont présentées. La plus intéressante est celle portée par le petit groupe parlementaire appelée LIOT (Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires)
Ce petit groupe parlementaire qui attisait la convoitise de Emmanuel Macron se trouve en position assez centrale pour réunir les deux groupes irréconciliables (et ce n'est pas moi qui irait le reprocher) la gauche (NUPES) et l'extrême-droite (RN).
Il faudrait 287 députés pour voter cette motion. Ceci sans compter sur les éventuels « absents » ou encore les abstentions qui pourraient réduire le nombre de scrutins nécessaires. Il manquerait 25 députés. Naturellement, tout le monde a les yeux tournés vers les députés Les Républicains qui se sont montrés plus que divisés sur le vote de cette réforme.
Si quelques uns de ces députés se disent, à l'heure où j'écris cet article, favorables à la motion déposée par LIOT, ils ne sont pas suffisant pour réunir les suffrages nécessaires.
? Le groupe LIOT a déposé une #MotionDeCensureTransPartisane sur la #ReformeDesRetraites.
— Libertés Indépendants Outre-mer et Territoires (@GroupeLIOT_An) March 17, 2023
Voici la déclaration du Président @BertrandPancher ⤵️ pic.twitter.com/5Yodd51kUG
Ainsi, force est de constater que la droite, s'accordant avec Emmanuel Macron et ses ministres, ne pourra qu'être à l'origine de l'échec de cette motion permettant l'adoption d'une réforme que 80% des français refusent.
Le « héros du jour » est, paradoxalement, le député de la Marne, Charles de Courson, plus exactement : Charles Amédée Simon du Buisson de Courson (on ne sait plus trop où commence le nom de famille), plutôt centriste (fut à l'UDI) et ex-soutien de Bayrou. Cependant, malgré sa proximité politique avec Emmanuel Macron (ne le cachons pas), il s'était opposé à la loi anti-casseur de Castaner. Il l'avait comparé avec à celles du régime de Vichy, évoquant son grand-père Léonel de Moustier, l'un des rares députés ayant refusé les pleins pouvoirs à Pétain, que ce dernier fera déporter. Rappelons que cette loi fut retoquée en partie par le Conseil Constitutionnelle (lire ici) et qu'elle trouve son origine chez "les Républicains".
D'ors et déjà, les Républicains, que ce soit les sénateurs ou les députés, portent une partie des responsabilités, avec Emmanuel Macron et son gouvernement, du conflit social qui s'est durci suite à l'adoption du 49.3. En effet, alors que le projet de réforme était, en lui même, mal ficelé et conduisait déjà à des grèves, les Républicains, via la personne de Eric Ciotti et au niveau du Sénat, Bruno Retailleau, ou encore Gérard Larcher, avaient décidé de la soutenir « coûte que coûte » ayant obtenus quelques ajustements purement cosmétiques.
? Signalement n°5672
— Violences Policières (@violencespolice) March 17, 2023
« Les mains dans le dos… ou je te pète le poignet putain »
Un policier à une personne interpellée. Menace.#Paris près de Châtelet, 17/03/23 22h30 ? Jules Ravel#ReformeDesRetraites #Revolution #ViolencesPolicieres pic.twitter.com/EjVmcWGD71
Celles et ceux qui se disent « sérieux » avec de jolies cravates, se sont accommodés aux approximations et mensonges des membres du gouvernement avec une facilité aussi remarquable qu'ambiguë. Le parti « les Républicains » se présente comme « de gouvernement » et appelle régulièrement à la mémoire de De Gaulle. Or, ses députés se sont montrés guère incisifs, plus proche de Panurge que de Antigone, et surtout tout aussi médiocres que les députés de Renaissance.
Au nom d'une prétendue approche constructive, ils apparaissent aujourd'hui, plus comme la bouée de secours parlementaire de Emmanuel Macron, plutôt que des opposants. Ces députés sont les fournisseurs officiels de voix parlementaire pour un président de la République qui n'a pas réussi à décrocher la majorité après son élection.
Je ne suis pas une électrice de droite. Par conséquent, les sentiments de ceux qui ont voté pour un député Les Républicains espérant y trouver une opposition constructive et surtout mieux habillée, ce n'est pas vraiment mon problème. Toutefois, je ne peux que constater qu'ils se sont fait berner par des cravates et des costumes. L'habit ne fait pas le moine, dit l'adage populaire. Cela se vérifie aussi en politique.
? Signalement n°5667
— Violences Policières (@violencespolice) March 17, 2023
Après l'avoir renversé en chargeant, plusieurs policiers infligent des coups « gratuits » à un manifestant au sol et n'opposant pas de resistance.#Paris #Concorde, 17/03/23 21h, ? @JulesRavel1#ReformeDesRetraites #Revolution #ViolencesPolicieres pic.twitter.com/7wZjR7pIzh
Eric Ciotti et Olivier Marleix ont annoncé que les députés de leur parti « les Républicains » ne soutiendra pas de motion de censure. Ils ont même menacé d'exclusion tous députés Les Républicains qui en signeraient une. Ils vivent, encore, dans l'illusion où ce parti comptait dans le paysage politique français.
Entre les condamnations de Nicolas Sarkozy, François Fillon, et les nombreuses affaires qui touchent d'anciens ministres, les Républicains ont fait moins de 5% des suffrages aux présidentielles de 2022 et ne comptent aujourd'hui qu'un peu plus de 60 députés. Son électorat s'est détourné d'eux. Les électeurs de Fillon (qui avait réuni 20% des électeurs en 2017), ont voté pour Emmanuel Macron (32 %), puis pour Éric Zemmour (18 %) et Marine Le Pen (16 %). 22 % de cet électorat LR a choisi de s’abstenir. Cela pour les présidentielles de 2023. (source)
On notera que ces statistiques illustrent parfaitement ce que je dénonçais il y a quelques années dans un précédent article. Il s'agit d'un parti qui a si bien repris les discours de l'extrême-droite, que 34% de ces électeurs ce sont finalement tourné vers Marine Le Pen ou Eric Zemmour sans en avoir même honte. « Les Républicains » sont devenus une sorte d'antichambre pour l'extrême-droite. Autrement dit, ils sont devenus plus pétainiste que gaulliste.
Malheureusement, leurs engagements pour une réforme particulièrement impopulaire et brutale, refusée par 93% des actifs, leurs acharnement à refuser de voter une motion de censure ne leur permettra pas de sauver grand chose.
Si Emmanuel Macron a réussi quelque chose est de mettre en posture particulièrement délicate ces 60 hommes et femmes. Ils sont les grands perdants politiques de cette réforme.
Comme la menace est le nouveau langage politique, Emmanuel Macron l'a utilisé quelques heures avant le vote (qui n'a pas eu lieu) promettant une dissolution du Parlement.
Bien entendu, il serait le premier perdant à ce jeu-là. Celui qui risque de perdre le plus de députés, c'est quand même lui.
Or, si la motion de censure n'est pas adoptée, la crise sociale – dont il est le principal responsable - pourrait s'aggraver considérablement.
Des mouvements sociaux ont émergé, plus déterminés que ne furent les Gilets Jaunes, surtout mieux organisés et aidés de syndicats rodés aux revendications sociales et salariales. La seule et unique solution qui restera à Emmanuel Macron, pour calmer les esprits, à défaut d'une motion de censure, sera une dissolution du Parlement. Comme il est un peu lent, pour ne pas dire obtus, il risque de mettre un peu de temps avant de devoir se plier à la pression sociale. Autrement dit, il faudra plusieurs semaines de luttes sociales encore, de manifestations, de violences policières, de blocage des activités économiques... .
Dans ce cas, les Républicains en seront les victimes collatérales. Ils disparaîtront définitivement du paysage politique français. Ils seront les irresponsables, au même titre d'ailleurs que les députés Horizons, MoDem, ou encore Renaissance, qui ont refusé de tout mettre en oeuvre pour la paix sociale.
La femme brutalement arrêtée dans cette vidéo est une journaliste du @LeMediaTV venue couvrir la manifestation.
— Guillaume Quintin ?ᄌマ?゚ヤᄏ (@GuillaumeQ1T1) March 18, 2023
Soyez prudent•es les Gens. La #Police est en roue libre et le@pouvoir de plus en plus autoritaire.#FaitesGaffe #ViolencesPolicieres pic.twitter.com/BY5Vw3Ss1b
Refuser de voter cette motion de censure est, finalement, conduire le pays à une explosion sociale d'importance allant jusqu'au blocage. Est-ce que c'est ce que souhaite ces députés Les Républicains qui se posent en donneurs de leçon dès lors qu'ils voient se pointer à l'horizon la moindre pancarte de récrimination ?
Veulent-ils engager leur responsabilité en maintenant un gouvernement qui n'a logiquement n'a rien à voir avec eux, et qui, par faiblesse et par bêtise, impose sans concertation et sans vote une réforme brutale et injuste, touchant des millions de personnes dans leur vie et leur avenir ?
? Signalement n°5665
— Violences Policières (@violencespolice) March 17, 2023
Après avoir bousculé la foule sur les trottoirs, un policier inflige un coup de matraque « gratuit » dans le visage d'une manifestante en partant.#Lille Rue des Postes, 17/03/23 20h30, ? @contactrevol#ReformeDesRetraites #Revolution #ViolencesPolicieres pic.twitter.com/Nljol1WeZX
Sans ce vote, ils porteront la responsabilité du gâchis social voulu par Emmanuel Macron. Le choix d'utiliser le 49.3, alors que la situation était déjà plus que tendue, après avoir refusé de rencontrer les syndicats (par dessus le marché), ne peux que conduire qu'à cette funeste conclusion : ce que souhaite Emmanuel Macron est d'aller au conflit social plutôt que renoncer à une réforme bancale, brutale, et injuste. A moins qu'il ne soit complétement idiot.
Les violences policières, qui illustrent cet article, sont aussi ce qui illustre le mieux le premier mandat de Emmanuel Macron et son gouvernement. C'est d'ailleurs ce que l'on retiendra de lui dans les années à venir. Une hyper-violence des forces de l'ordre qui fracassent des gens sans motif n'hésitant pas à poser avec l'extrême-droite. Une hyper-violence politique.
Du feu. Des larmes. Du sang