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La Maçonne

Les loges d’adoption : l’Ordre des Amazonnes (3).

Les loges d’adoption : l’Ordre des Amazonnes (3).

Dupes, ces frères protestant contre l'existence des loges d'adoption peuvent être certainement considérés comme tels, au regard de ce rituel. Les premières franc-maçonnes avaient mieux perçu que bons nombres de frères ce que la franc-maçonnerie pouvait leur apporter : une école de liberté, celle pour l’apprendre, celle pour la travailler et aussi celle pour l’assumer et la revendiquer. Elles maîtrisaient parfaitement toutes les arcanes de cette liberté et des valeurs véhiculées par leurs frères.

Si le rituel de "l'Ordre des Amazonnes" du fait de ses propos peuvent faire sourire – mais est-ce que les nôtres relatant nos origines à « la plus haute antiquité » sont plus sérieux ? - il faut souligner l’importance sociale et précurseur de ce qu'il propose.

Hormis les caractéristiques des plateaux, il faut souligner les préparation de la récipiendaire appelées l’Agrégée. Celle-ci doit se vêtir en habit d’homme, abandonner ses bijoux et argent, un œil de Gorgonne (une mouche) est tracée sur son front et sur sa coiffure des rubans en forme de serpents. Un « Cavalier » autre récipiendaire est gardé par le Patriarche Gardien. L’ouverture des travaux est quasiment identique à ce que nous connaissons : un dialogue.

Les récipiendaires sont appelés des « Captifs ». Une marche militaire s’en suit faisant entrer les deux captifs.

 Le bonheur d’être agrégée ou bien la mort.

Serment et discours s’en suivent.

Le catéchisme du grade (oui, il y a même un catéchisme) indique plus précisément la nature symbolique de ce grade quelque peu surprenant. Il est à noter que l’assemblée était mixte, mais que c’est une sœur (appelée Reine) qui préside et mène la cérémonie d’admission.

Le blog de Christian Guillon (La Révolution et nous) a produit deux articles sur ce même degré, l’un relatant sa source d’information, l’autre mentionnant l’existence d’un autre manuscrit de ce grade, disponible à Lyon. L’existence de deux manuscrits, qui nous restent, montre que ce grade a été utilisé.

On notera que le modèle de ce grade reste strictement dans une symbolique guerrière. Il propose surtout tout un programme :

Il ordonne aux femmes de secouer le joug des hommes, & de regarder comme des tyrans ceux qui refusent de se soumettre à leurs ordres.

Pourquoi?

L’étude des sciences, les dignités, les charges de l’etat & le maniement des armes

Si Christiant Guillon cherche dans la Révolution de 1789 des femmes de combat, maîtrisant les armes, il faut peut-être aussi regarder, dans notre passé, et y trouver un écho même lointain à ce que nos frères contemporains considèrent comme exclusivement masculin : la chevalerie. Nous pourrions nous intéresser au livre d'une autre historienne Sophie Cassagne-Brouquet « Chevaleresse : une chevalerie au féminin ».

Cependant, hormis l'anecdote de l'usage des armes, elles demandaient tout autant le droit à l'instruction que participer à la vie politique. Tout est symbole. Il nous faudrait alors regarder du côté des femmes, qui se sont distinguées lors de la révolution, comme Olympe de Gouges, qui ne faisait que mettre au féminin ce qui était donné aux hommes, sans qu'ils n'aient besoin de se battre vraiment. Il faut aussi regarder dans cette ultra-féminisation d'un rituel, une idée de la femmes plus complète qu'il n'y parait : guerrière accomplie, mère et éventuellement amante, instruite de sciences, meneuse d'état et pourquoi pas? guide spirituel.

Se considérer comme étant sous « le joug des hommes » n'est pas a priori surprenant pour des femmes, qui, instruites, étaient conscientes de leurs valeurs. C'est l'analyse des raisons de ce « joug » qui laisse pensif. Dit autrement, les hommes ont peur des femmes. Peut-être n'ont-elles pas osé aller plus loin en estimant que c'est leur maternité qui est en cause. Chasser l'enfant mâle pour le rendre à leur père, n'est-ce-pas finalement leur réalité? L'héritier mâle n'avait-il pas pour ces femmes un avenir assuré, celui de prendre la place du père, par la naissance plutôt que par les valeurs.

Etaient-elles dupes ? Qu'avaient les rituels des loges masculines de plus ? Rien. Si certains pouvaient être considéré comme novateurs, celui-ci a plus d'un siècle d'avance au regard de notre histoire. Il appartient à cette dimension à la fois sociale et politique qu'aujourd'hui encore nous nous réclamons, sans être certains d'appartenir.

Ce qui surprendra plus d'un lecteur est qu'il a été écrit par des hommes.

Lilithement vôtre,

D. Qu’ordonnent ces lois ? =
R. Quatre commandemens p[rinci]paux.
D. Quel est le premier ?
R. Il ordonne aux femmes de secouer le joug des hommes, & de regarder comme des tyrans ceux qui refusent de se soumettre à leurs ordres.
D. Pourquoi cela ?
R. Parce qu’il est naturellement honteux aux femmes d’obéir à ceux qu’elles mettent au monde, qu’elles alaitent & qu’elles élèvent.
D. Ne serait-il pas également honteux aux hommes de leur obéir ?
R. Non. =
D. Pourquoi ?
R. Pour que l’amour, qui est un mouvement de la nature, ayant, de tout tems aservi la volonté des hommes sous le joug de l’objet qu’ils aiment, il s’ensuit que la tyrannie seule a pu les pousser à priver le beau sexe des connaissances, des emplois qu’ils devraient au moins partager avec lui.
D. Quels sont ces connaissances & ces emplois ?
R. L’étude des sciences, les dignités, les charges de l’etat & le maniement des armes.
D. Pourquoi dites-vous que c’est par la tyrannie qu’elles en sont privées ?
R. Parceque les hommes craignent la subtilité de leur esprit & l’intrépédité de leur courage ; prenant un soin extrême de les faire élever dans la mollesse & l’oisiveté, pour couper en elles la racine de toutes les vertus naturelles.
D. Les femmes de ce siècle peuvent-elles les pratiquer puisque cela n’est pas d’usage aujourd’hui ?
R. Oui, en se faisant recevoir du Conseil, afin de parvenir aux grades qui sont composés de ces sciences.
D. Combien y a-t-il de gardes ? = R. Cinq.
D. Quels sont-ils ?
R. L’Amazonique, le Mathématicien, le Rhétoricien, le Physicien & le Philosophe.
D. Que contient l’Amazonique ? = R. Le prix, le mérite & la valeur du beau sexe.
D. Que lui enseigne-t-il ? = R. L’usage de son esprit & de ses forces.
D. Qu’entendés-vous par les forces de son esprit ?
R. L’exercice & le maniement des armes.
D. Quel âge avés-vous ? = R. Treize ans.
D. Pourquoi répondés-vous ainsi ?
R. Parceque les anciennes Amazonnes ne menaient leur fille à la guerre qu’à l’âge de treize ans. C’est pourquoi aussi on n’admet personne au Conseil au dessous de cet âge.
D. A quel âge leur donnait-on les sciences ?
R. Lorsqu’elles avaient donné des preuves de leur courage dans les combats en faisant des prisonniers. C’est pourquoi on ne communique les autres grades aux Amazonnes de ce siècle qu’après qu’elles ont donné des preuves de leur intelligence sur les privilèges naturels en réduisant les hommes à leurs devoirs.
D. Mais ces grades scientifiques dont vous parlés ne sont-ils pas plutôt capables de décourager le beau sexe sur l’entreprise du rétablissement de ses droits que de l’y exciter.
R. Non, parceque l’auteur de la nature ayant partagé les intelligences avec une parfaite égalité, dans l’un & l’autre sexes, lors de la création, il s’ensuit que toutes les connaissances leur étant communes seront comprises avec facilité, lorsqu’on aura tiré le rideau de l’imposture qui les voile aujourd’hui.
D. Qu’entendez-vous par le rideau de l’imposture ?
R. J’entends le faux des grammaires, l’illusion des méthodes & la barbarie des termes que la férocité des hommes a répandu sur les sciences à dessein d’en priver le beau sexe & ceux d’entr’eux qui le méprisent.
D. De quelle manière ces grades montrent-ils donc ces sciences ?
R. A l’exemple du créateur, sous le joug de la raison & du plaisir.
D. Quelle est la 3e loi des Amazonnes ?
R. La communauté des biens en parts égales entre les Amazonnes et les Patriarches.
D. Quels étaient les Patriarches, & pourquoi entrent-ils en partage ?
R. C’est que, lors de la défaite des Seythiens, il ne resta dans la ville que des hommes très agés dont la plupart étaient pères des Amazonnes ; & les reines ordonnèrent qu’ils auraient entrée au conseil, afin de les aider de leurs prudence & valeur & expérience ; & qu’en reconnaissance, ils partageraient les biens du royaume, à parts égales, avec les Amazonnes.
D. Que nous enseigne cette loi ?
R. Les secours, les services & l’assistance que tous les agrégés doivent se rendre mutuellement dans tout l’univers.
D. Quelle est la 4e loi ?
R. De ne se choisir d’époux que parmi les prisonniers.
D. Comment les Amazonnes se conduisaient-elles dans le mariage ?
R. Elles observaient trois choses : l’autorité sur leurs époux, l’exclusion des enfans mâles, & l’éducation de leurs filles.
D. Expliqués-nous la première ?
R. Leurs epoux n’avaient aucun droit judiciaire, & elles les excluaient de leur lit pendant la guerre.
D. Quelle instruction doit-on tirer de cette conduite ?
R. Elle enseigne aux Amazonnes modernes à maintenir l’ordre Amazonnique dans toute sa pureté ; & d’en exclure les hommes qui voudraient innover ou contredire leurs privilèges.
D. Expliqués-nous la seconde ?
R. Les Amazonnes chassaient du royaume leurs enfans mâles aussitôt qu’ils pouvaient marcher.
D. Pourquoi cela ?
R. Parce qu’elles craignaient qu’ils ne s’arrogeassent le droit dont leurs pères jouissaient.
D. Expliqués-nous la troisième ?
R. Les anciennes Amaz. élevaient leurs filles au maniement des armes après leur avoir brulé la mamelle droite.

Cathéchisme de l'Ordre des Amazonnes

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B
Attention, Lilith, l'existence de manuscrits ne préjuge pas d'un fonctionnement. <br /> Dans ce cas là, en plus il devait déjà exister dès l'époque un jeu de mot implicite sur l'amazonnerie, pour peu qu'un des frères fût zézaillant, ça devait bien marcher<br /> Donc sans doute pas loin de constituer un canular, cette variante, mais comme tu le soulignes il y a plus ridicule chez ceux qui plongent dans une tradition immémoriale et néanmoins fantasmée.
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L
Je vais donc modérer mon propos ...et faire une modification aussi sur un autre article (le num 2) suite à la lecture de ton livre &quot;les femmes et la FM en Europe&quot; page 18.
J
Amazonne... Ho là là Lilith, mais où t'arrêteras tu? Ca c'est de la provoque, et de la bonne!!!<br /> Merci pour la chanson de Zazie...
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